Le portrait en infrarouge

L’application de la technique infrarouge à la photographie de portrait s’observe dès la période argentique avec des portraits noir et blanc au rendu fantasmatique. Parmi la production photographique de l’époque, nous pouvons notamment citer la série de portraits de spectateurs réalisée par Weegee dans des cinémas à l’aide d’un flash modifié.

Cette technique plaît aussi aux artistes psychédéliques, à l’image des pochettes d’album de Franck Zappa (« Hot Rats » – Cal Schenkel) et Jimi Hendrix (« Are you experienced » – Bruce Fleming). Bob Dylan a également été photographié en aerochrome par Elliott Landy.

De nos jours, la photographie infrarouge numérique appliquée à ce domaine permet d’obtenir des portraits délicats et originaux, en noir et blanc comme en couleur, dont le rendu dépend directement du filtre utilisé.

La prise de vue en photographie de portrait infrarouge

La technique de prise de vue en photographie de portrait infrarouge ne diffère pas de celle suivie en paysage :

  • le live-view est toujours conseillé, ici associé au zoom de la zone de mise au point afin de s’assurer de la netteté des yeux du sujet.
  • le contrôle de l’exposition s’effectue toujours en observant l’histogramme des trois composantes RVB.
  • les objectifs compatibles (absence de hot-spot) restent les mêmes.
  • l’enregistrement des fichiers doit s’effectuer en format RAW.

Un seul paramètre est modifié : le réglage de la balance des blancs. S’il est toujours conseillé de régler la balance des blancs avec une charte gris neutre, un réglage plus fin devra obligatoirement être effectué en post-traitement.

Le post-traitement en photographie de portrait infrarouge

Comme mentionné précédemment, le principal paramètre à régler au niveau du post-traitement est la balance des blancs. En effet, une balance des blancs réalisée sur une charte gris neutre en l’absence de mélangeur de couche entraîne une teinte colorée au niveau de la peau pour des filtres inférieurs à 720nm, comme le montre l’image ci-dessous :

Ce type de réglage n’est donc pas compatible avec un rendu subtil du modèle.

Une technique fonctionnant très bien consiste alors à régler la balance des blancs de sorte à ce que les histogrammes des composantes Rouge et Bleu se superposent.

Cette technique était déjà abordée dans les tutoriels du traitement avec Lightroom  et du traitement en 720nm. En réglant la balance des blancs de la sorte, la photographie présente alors une teinte globale tirant vers le violet-mauve, comme le montre l’exemple à 720nm ci-dessous :

Une fois cette première étape réalisée, il suffit d’utiliser le mélangeur de couches de votre logiciel de développement RAW et de répartir la composante Vert en 50% de Rouge et 50% de Bleu. Ce réglage permet de retrouver les couleurs de l’infrarouge :

Cette technique s’applique à tous les filtres infrarouges existants, comme le montre l’image ci-dessous :

La teinte de la peau retrouve un rendu chaud qui n’est plus affecté par la teinte froide des cheveux et de la végétation. L’ensemble de ce comparatif a été réalisé avec les filtres développés par Kolari Vision.

Limites et inconvénients de la photographie de portrait infrarouge

Les exemples présentés précédemment mettent en évidence la criticité du type de filtre utilisé, qui influe directement sur le rendu de la peau, des cheveux et de la végétation. La photographie de portraits en infrarouge nécessite une certaine rigueur à la prise de vue et lors du traitement afin d’obtenir des images subtiles et déstabilisantes. La morphologie des visages change de manière notable comparée à leur rendu classique. De même, les veines ont tendance à transparaître à travers la peau, le sang absorbant le rayonnement IR. Cet impact est notamment illustré par Edward Thompson dans sa série « The Vein ».

En conclusion…

… la photographie infrarouge s’applique aussi bien au paysage qu’au portrait, offrant à ce dernier domaine un rendu de porcelaine unique.